Chasser avec des filets verticaux dans les Pyrénées

L’origine de cette méthode de chasse est plutôt obscure : on raconte que c’est un berger du côté du col d’Ibañeta qui un jour en voyant passer un vol de palombes au-dessus de sa tête, lança dans leur direction une pierre blanche. L’effet fut immédiat et les palombes prenant la pierre pour un épervier plongèrent d’un coup pour passer le col au ras du sol. Ce berger récidiva sur le vol suivant et l’effet fut le même. Il continua pour s’amuser. Un moine de l’abbaye observant avec attention le manège eut l’idée de faire monter des filets verticaux au milieu du col où passaient les oiseaux… les pantières étaient nées.

Des améliorations techniques furent rapidement apportées : on remplaça les pierres par des palettes de bois peintes en blanc, on installa des hommes le long de la vallée pour crier et secouer des drapeaux blancs (chatars) dans le but de diriger les vols vers les emplacements des filets, on laissa des trouées dans le manteau forestier du col pour faire croire à la palombe qu’il y avait une voie possible pour s’échapper.

Les filets utilisés au début étaient en chanvre, filés et tissés par les marins de la côte. Ils étaient lourds et difficiles à manœuvrer les jours humides mais n’offraient que très peu de résistance au vent. Avec le temps sont apparus les filets en nylon en forme de cage (avant, on laissait un ventre au filet pour que le vol s’y engouffre). Ils sont beaucoup plus légers, plus faciles à manipuler pour récupérer les captures et à hisser, mais ils comportent quelques petits inconvénients : le nylon brille au soleil, et plus légers, ils offrent une résistance au vent plus importante qui les font bouger les jours de brise, ce que la palombe détecte facilement, et qu’elle évite aussi facilement.

Les chasseurs jouent sur l’instinct de survie de la palombe face à son principal prédateur : l’épervier et l’autour.

Ceux-ci attaquent les palombes avec une très grande vitesse par le dessous en frappant la palombe à la poitrine. Pour acquérir cette vitesse, ces rapaces plongent de très haut et passent au dernier moment sous le vol. C’est ce qu’imitent les raquettes lancées par les chasseurs. Pour déjouer ces attaques, les palombes n’ont qu’une seule solution : réduire la distance qui les séparent du sol pour empêcher l’oiseau d’attaquer par dessous. C’est pour cela qu’elles plongent elles aussi vers le sol. Et c’est là que les attendent le piège : les filets.

Déroulement de la chasse

  • Les premiers chasseurs postés le long du couloir que forme la vallée agitent des drapeaux (chatars) et crient pour guider le vol vers l’emplacement des filets.
  • Entrent en jeu ensuite les lanceurs de raquettes qui font baisser le vol.
  • Ensuite, le dernier rabatteur finalise le travail de ses prédécesseurs toujours à l’aide de raquettes pour faire plonger les palombes dans les filets.
  • Les palombes apeurées rentrent dans le piège et les responsables des filets les ferment.
  • L’ensemble des chasseurs qui sont autour des filets sort des caches pour ramasser les palombes capturées dans le filet qui est maintenant fermé au sol.

Il y a beaucoup de paramètres qui rentrent en jeu dans la capture des palombes au filet :

  • Les conditions climatiques,
  • le savoir-faire des chasseurs,
  • la discrétion des visiteurs (la plupart des sites sont ouverts au public).

Assez de paramètres pour que très souvent les palombes évitent le piège au dernier moment.

Une fois les palombes au sol, emmaillotées dans le filet, les ramasseurs se glissent sous l’avant du filet. Ils ramassent les palombes très rapidement au cas où un autre vol arriverait. Ils glissent les oiseaux dans la « chamara », veste de toile bleue ou noire très ample, ouverte sur le devant et serrée à la taille par un cordon. Les filets peuvent donc être relevés très rapidement.

Les palombes sont donc prises vivantes. Celles du début de saison peuvent être vendues aux chasseurs pour servir d’appelants en cabane. Plus tard, les captures sont vendues mortes à des particuliers ou à des restaurants.

Ce qui est sûr, c’est que le directeur de chasse tient à jour les comptes des commandes et des jours de présence des chasseurs, car à la fin de la saison, il faudra faire le partage. Pour certaines pantières, il faudra réserver une certaine quantité des prises à la commune « hôte » qui aura « cédé » son droit de chasse ou aux différents « propriétaires ». Pour d’autres, les chasseurs sont rétribués en fonction des prises, non pas en palombe cette fois-ci mais bel et bien en argent. Certaines louent une partie du territoire de rabat à la commune et doivent donner une palombe à chaque habitant … .

Chaque pantière à sa façon très spécifique de gérer ses prises.

On trouvera aussi sur quasiment toutes les pantières des locations de tir au vol derrière les filets. Une façon de plus de pouvoir financer l’entretien et le maintien de l’activité de certaines qui ont failli être définitivement fermées il y a quelques années, mais très contreversé car beaucoup de paloumayres n’y trouvent rien d’éthique et de sportif à tirer sur des vols « travaillés » en amont par de véritables passionnés de l’oiseau bleu.

Pantières en exploitation en France

Pays  Basque

  • Les Aldudes (commune des Aldudes – 500m)
  • Béhorléguy ou Oloby (commune de Béhorléguy – 800m)
  • Etchalar (filets en Espagne, rabat en France commune de Sare – 500m)
  • Col de Gatagorena (commune d’Ordiap – 780 m )
  • Lantabat (communes de Lantabat/Suhescun, Ainhice-Mongelos – 337m )
  • Lecumberry (communes de Lecumberry et Bussuranits-Sarrasquette – 614m )
  • Col de Naphal (commune d’Ordiarp – 520m)
  • col d’ Osquich (commune de Musculdy – 392m)
  • Sare (commune de Sare – 300m)

Béarn

  • Lanne en Barétous (commune de Lanne). Superbe randonnée a faire pour monter jusqu’à cette palombière avec des panneaux explicatifs tout le long de la ballade…Attention ça grimpe!

Il est depuis le début du siècle dernier, interdit de monter une nouvelle installation. Il est donc important que les jeunes chasseurs basques et béarnais prennent la relève des anciens pour éviter qu’une des traditions de nos montagnes pyrénéennes se perdent et avec elle une partie de l’identité d’un peuple.

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